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Big data et santé (1/3) Opportunités | Le Cercle Les Echos

Big data et santé (1/3) Opportunités

LE CERCLE. (par Thomas Gauthier, Guillaume Miquelard-Garnier et Jean-Pierre Camilleri) – Les “big data” doivent être au service de soins de qualité pour tous… Sans se substituer à la dimension humaine qui doit prévaloir tout au long du parcours de soins de chaque patient.

 

Les experts du cabinet de conseil McKinsey proposent une définition subjective et dynamique des big data. Il s’agit pour eux de tout ensemble de données dont la taille est telle qu’il ne peut pas être acquis, stocké, manipulé ou analysé par les logiciels disponibles à ce jour. Face à leur prolifération, il nous faut être capable d’interpréter les big data en maitrisant des phénomènes jusqu’alors invisibles car hors de notre portée. En somme, il faut faire du sens à grande échelle.

Le domaine de la santé connait ainsi un véritable déferlement de données de toutes natures – personnelles, cliniques, vidéo – encore largement sous-exploitées.

S’il ne s’agit pas encore d’une réalité accessible à tous les patients, la valeur de pareils corpus organisés de données n’a pas échappé aux chercheurs. Une étape est franchie en direction de l’aide au diagnostic et à la décision thérapeutique : il est désormais essentiel de développer des systèmes capables d’aider le médecin à valoriser les big data au service de soins meilleurs pour le patient.

Dans l’introduction d’une étude commanditée par la Haute Autorité de Santé, les systèmes d’aide à la décision médicale sont ainsi présentés comme des “applications informatiques dont le but est de fournir aux cliniciens en temps et lieux utiles les informations décrivant la situation clinique d’un patient ainsi que les connaissances appropriées à cette situation […] afin d’améliorer la qualité des soins et la santé des patients”.

En pratique, l’aide à la décision médicale fait déjà partie de l’arsenal dont dispose le médecin, parfois sous des formes rudimentaires, difficilement consultables (notamment dans des situations d’urgence) et difficiles à mettre à jour. Pléthore de manuels d’aide à la décision thérapeutique sont ainsi édités et régulièrement mis à jour par un éventail tout aussi varié de sociétés savantes. L’utilité de ces ouvrages atteint cependant ses limites en ce qu’ils ne permettent pas de personnaliser le parcours de soins du patient mais proposent plutôt des solutions génériques. La tâche d’adapter les soins en fonction des spécificités du patient incombe aujourd’hui encore au médecin.

Celui-ci est par ailleurs confronté à une difficulté quelque peu déroutante. La masse des connaissances médicales ne cesse de s’accroitre. L’arsenal thérapeutique s’enrichit tout aussi vite. Les données patient s’accumulent, notamment avec le développement de la télémédecine (parfois doublée de géolocalisation) et des capteurs dédiés utilisés lors de la prise en charge des maladies chroniques. La complexité des décisions auxquelles fait face le médecin dans l’exercice de sa profession est devenu ingérable.

C’est ainsi que de nombreux domaines de la prise en charge du patient et de la prestation de soins sont amenés à bénéficier de la valorisation judicieuse des big data par les systèmes d’aide à la décision médicale. On citera les situations d’urgence et de soins intensifs où l’équipe médicale doit être capable de prendre des décisions capitales dans un laps de temps extrêmement court. Le diagnostic et le choix de la stratégie thérapeutique appropriée dans le cas de pathologies complexes telles que le cancer sont également des domaines de l’intervention médicale qui appellent une exploitation efficace d’un corpus de données cliniques hétérogènes accumulées tout au long du parcours de soins du patient.

Dans le domaine de la recherche médicale, la codification des actes et le dossier médical personnel ouvrent la voie à des analyses poussées des meilleures combinaisons de traitements sans pour autant nécessiter la mise en place de protocoles de test longs et coûteux en grandeur réelle. Sous réserve du respect de la vie privée, l’analyse des flux de transactions, codifications des actes, remboursements de soins, ou encore paiements d’indemnités permettrait de détecter en temps réel des points aberrants dans le parcours de soins et les procédures administratives qui lui sont associées. Dans le cas particulier de la fraude, une décision aussi lourde de conséquences que la suspension du versement des indemnités pourrait être envisagée et les raisons de son application rigoureusement documentées dans un souci de transparence et d’équité.

L’optimisation du parcours de soins, le déploiement de la recherche médicale au-delà des protocoles idoines et le juste accès aux prestations sociales sont des domaines d’application privilégiés pour les big data. Celles-ci doivent être mises au service d’un système de santé efficient dont la pérennité sera garantie par la prise de conscience collective de nos droits et de nos devoirs à son égard.

LES AUTEURS

Thomas Gauthier, et Guillaume Miquelard-Garnier sont co-initiateurs de l’Alambic, (laboratoire d’idées pour appréhender les enjeux de société au moyen d’une recherche scientifique et d’une innovation technologique conscientes.)

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